« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Via dei Cinquecento


 

 

Pèsent entre nous deux

trop de mots non dits

 

et la faim non assouvie,

les cris des enfants non apaisés,

la poitrine des mamans phtisiques

et l’odeur —

odeur de haillons, d’excréments, de morts —

s’insinuant à travers des couloirs sombres

 

ils sont une haie qui gémit au vent

entre moi et toi.

 

Mais dehors,

deux grands feux fixes sous des étoiles brumeuses

disent des vastes débouchés

et de l’eau

qui va vers la campagne ;

 

et chaque lame de lumière, chaque église

noire contre le ciel, chaque pas

de pauvres chaussures détruites

 

amène par des voies d’air

religieusement

moi à toi.

 

 

27 février 1938

Antonia Pozzi / Une vie irrémédiable - Poèmes, écrits