« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

L’imparfait


 

 

La question :

Est-ce que Bruno mort est un oiseau de ce printemps ?

La réponse :

même si Bruno mort est un oiseau de ce printemps

l’oiseau n’en sait rien.

Car supposons qu’avant d’être Laurence je fus un oiseau je

n’en sais plus rien ;

le seul lieu où me rapprocher de ce possible oiseau que je

fus :

être Laurence la plus amnésique, la plus radieuse.

 

Laurence radieuse est

aux lisières de l’oiseau

de l’arbre

du vent

L’oiseau sans souciance

(c’est à dire chaque oiseau)

vole à la lisière de Bruno mort

qui a joint le point ultime de Bruno vivant

 

Laurence radieuse dans ce printemps

Laurence qui donne pour donner

est aux lisières de Bruno mort.

 

 

◼︎

 

 

Brasser

Brasser

Brasser les collines et les rivières

Brasser

Brasser

les pierres et les montagnes

les vivants et les morts

Brasser les vents

Des grands cercles de bras

dans l’air immobile

Brasser brasser

et puis une valse

une valssssss

une valssssss hé

vals-sss-sss hé

vals- sss-sss hé

une valse sismique

une valse mirifique

une valse-sss-sss hé

hé une valse

 

brasser

les liens qu’on n’a plus

les liens qu’on n’aura plus jamais

comme un chien perdu

ou un bateau sans mât

qu’on lâche pour la première fois

et j’ai vu

Laurence Vielle / L’imparfait (extraits)