« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

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La rivière n ‘a pas d’œil      pas de langue

pas de pied      pas de corps

pourtant nous sentons que sa langue parle

ses yeux brillent      son corps partage le monde en

    deux

elle bouge      disparaît      nous scinde éternellement en

    deux

une part de nous-même la ressent      ses yeux

scintillent      noirs      tristes      beaux

disent ce que nous rêvons de révéler

cependant l’autre part de nous-même se moque de ces

    mensonges

ce que nous appelons rivière

n’est jamais perçu

elle est seulement sur notre langue

dans les yeux      à peine l’imaginons-nous

à peine disons-nous « Tout passe »

alors on ne voit plus rien

Yu Jian / Shiji yu tuxiang (Poèmes en images)
traduit du chinois par Isild Darras