« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

La soirée qui mendie l’amour


 

 

La soirée qui mendie l’amour.
Vent froid, ciel gris.
Soleil mort.
La soirée qui mendie l’amour.

Je pense à ses paupières closes,
la soirée qui mendie l’amour,
je pense à ses genoux exsangues,
la soirée qui mendie l’amour,
et à ses mains aux ongles verts
et à la pâleur de son front
et à sa gorge bâillonnée…
La soirée qui mendie l’amour,
la soirée qui mendie l’amour,
la soirée qui mendie l’amour.

Non,
Car elle marche sur mes pas,
non ;
car elle m’a parlé, car elle me salue,
non ;
car je regarde passer son enterrement,
non ;
car elle me sourit, étendue,
étendue, douce et étendue,
sur la terre, étendue,
morte d’un seul coup, étendue…

Non.

Nicolás Guillén / Le chant de Cuba
traduction par Claude Couffon