« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

A cel que ditz entre saig e joglar

 

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Celui qui prétend qu'entre bourreau (/bras séculier) et jongleur
il ne sait, ni ne voit, ni ne connaît de différence
je répondrai qu'il sait bien que quand on ne dit pas la vérité on ment.
Dieu, en effet, a bien voulu accomplir de grands miracles en la personne des jongleurs
car les jongleurs suivent toujours les bons
tandis que le bourreau recherche toujours les méchants.
 
Saint Genis, jongleur de son état
aima et servit Dieu loyalement
et Dieu lui donna durant sa vie le compagnon
qui devait séjourner avec lui en paradis.
Le jongleur donnerait au bourreau tout ce dont il a besoin
tandis que le bourreau en grande joie lui couperait le pied.
 
C'est à des jongleurs que fut donnée la chandelle d'Arras
grâce à laquelle Dieu fait aujourd'hui des miracles.
Le désir du jongleur est que tout le monde soit parfait
et le bourreau prend plaisir à voler et à dérober.
Le jongleur, en le cachant, sauverait le bourreau
alors que le bourreau pendrait le jongleur par le cou.
 
Nous savons que Thèbes fut sauvée grâce à un jongleur
lorsqu'Alexandre voulut massacrer ses habitants.
Les jongleurs font maintes réconciliations en chantant de beaux poèmes
ce en quoi on ne saurait les comparer aux bourreaux.
Le jongleur devant tous pardonnerait
tandis que le bourreau, doublant la peine, l'accuserait.
 
De même, Daurel avait renom de jongleur
qui pour le Seigneur livra son fils au tourment.
Des jongleurs de la sorte, je pourrais en dénombrer plus de cent
si je ne craignais d'allonger trop mon chant
car le jongleur répand joie et courtoisie
tandis que que le bourreau tout un an, ne donne que tristesse, douleur et félonie.
Je ne parle pas des jongleurs pour moi-même
je ne suis pas jongleur et je n'en ai point les usages
car j'agis comme agissent les grands rois de bon entendement
mais j'entends attribuer à maintes gens toute sorte de noms
et l'on traite de clerc un tel chez qui il n'y a que fausseté
avec autant de perfidie que de clergie.
 
Je sers mon Sobrepretz et je voudrais pour ma Domna-dels-Cartz
autant d'honneur que j'en désirerais pour moi.
 
Si en laçant des mots, le trobar est jonglerie
moi et le roi, nous sommes ainsi jongleurs de la même famille.  

Cerveri de Girona, dit aussi Guillem de Cervera. Ce troubadour, dont l'existence est attesté dans les textes de 1259 à 1285, était le poète officiel de la cour royale d'Aragon. Il se fit également remarquer à la cour de Rodez