CRÉSUS
Par domcorrieras, le samedi 25 février 2017 - Poèmes & chansons - lien permanent
Que la pourriture
Aux extrémités de radium
aux clous mimétiques
Vous aspire
Poitrine en avance sur son néant
Espoir qu’une lame de limon inverse
Bouche d’air imagination
Enfants agiles du boomerang
Longs amants aux plaisirs retirés
Filante vapeur insensible
Aux chairs agrandies pour la durée du sang
Aux successions hantées
À l’avenir fendu
Vous êtes le produit élevé de vos intègres défaillances
Virtuoses de l’élan visionnaires imprenables
Côte à côte dormez l’odyssée de l’amour
Les pièces de tourments éteintes
L’indiscernable blé des cratères
Croît en se consumant
Fossile frappé dans l’argile sentimentale
— Disons à toute épreuve l’étendue de l’amour —
Une femme suit des yeux l’homme vivant qu’elle aime
Baignée dans le sommeil qui lave les placers
À la faveur de l’abandon
Lui verse un léger malaise
Ha ! comme il bombe la paupière
L’obstiné conventionnel
Assiette nue offerte à l’air
Au banc des mangeurs de poussière
Les mots restaurent l’Automate
Les mots à forte carrure s’empoignent sur le pont élastique
Qui mène au cloître du Cancer
Mains obscures mains si terribles
Filles d’escommuniés
Faites saigner les têtes chastes
Derrière les embruns on a nommé le sang
La chair toute-puissante ranimée dans les rêves
Nourricière du phénix
Mort minuscule de l’été
Dételle-moi mort éclairante
À présent je sais vivre.
René Char / Poèmes militants (1932)