UN HOMME ET UNE FEMME ABSOLUMENT BLANCS
Par domcorrieras, le jeudi 9 juin 2016 - Poèmes & chansons - lien permanent
Tout au fond de l’ombrelle je vois les prostituées merveilleuses
Leur robe un peu passée du côté du réverbère couleur des bois
Elles promènent avec elles un grand morceau de papier mural
Comme on peut en contempler sans serrement de cœur aux anciens étages d’une maison en démolition
Ou encore une coquille de marbre blanc tombée d’une cheminée
Ou encore un filet de ces chaînes qui derrière elles se brouillent dans les miroirs
Le grand instinct de la combustion s’empare des rues où elles se tiennent
Comme des fleurs grillées
Les yeux au loin soulevant un vent de pierre
Tandis qu’elles s’abîment immobiles au centre du tourbillon
Rien n’égale pour moi le sens de leur pensée inappliquée
La fraîcheur du ruisseau dans lequel leurs bottines trempent l’ombre de leur bec
La réalité de ces poignées de foin coupé dans lesquelles elles disparaissent
Je vois leurs seins qui mettent une pointe de soleil dans la nuit profonde
Et dont le temps de s’abaisser et de s’élever est la seule mesure exacte de la vie
Je vois leurs seins qui sont des étoiles sur des vagues
Leurs seins dans lesquels pleure à jamais l’invisible lait bleu
André Breton / Le revolver à cheveux blancs