VIII - À la mort
Par domcorrieras, le vendredi 6 novembre 2015 - Poèmes & chansons - lien permanent
De toutes façons tu viendras — pourquoi pas maintenant ?
Je t’attends — vivre est trop dur.
J’ai éteint la lampe, ouvert tout grand la porte
Pour toi, si simple et merveilleuse.
Prends la forme que tu voudras,
Engouffre-toi, projectile empoisonné,
Faufile-toi avec ta pierre, ta chaîne, comme un bandit,
Ou tue-moi d’une fièvre typhoïde,
Ou d’une fable de ton invention
Mille fois rabâchée, —
Que mon regard aille au-delà de la casquette bleue
Et du concierge blême de terreur.
Maintenant tout m’est égal. Le Ienisseï tourbillonne,
L’étoile polaire brille.
Et l’éclat marine des yeux que j’aime
Couvre la dernière épouvante.
19 août 1939. Maison de la Fontanka
Anna Akhmatova / Requiem (extrait)
Traduit du russe par Marion Graf et José-Flore Tappy