Seulement pour les fous
Par domcorrieras, le mercredi 11 juin 2008 - Proses & autres textes - lien permanent
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Le quartier ancien m’accueillit, la petite église, éteinte, irréelle, transparaissait dans la grisaille. Subitement, je me rapellai l’incident du soir, la porte ogivale mystérieuse, l’enseigne énigmatique, les lettres railleuses et fuyantes. Quelle était l’inscription ? « Tout le monde n’entre pas » Et : « Seulement pour les fous ». Avec avidité, je fixai le vieux mur, souhaitant secrètement que recommençât la magie, que m’appelât, moi le fou, l’enseigne lumineuse, et que me laissât entrer la petite porte. Là-bas, peut-être, trouverais-je ce que je souhaitais ?
Là-bas entendrais-je ma musique ?
Le sombre mur de pierre me contemplait, serein, dans l’obscurité profonde, fermé, abîmé, dans son rêve. Nulle tace de porte ni d’ogive, rien que le mur calme et noir. Avec un sourire, je poursuivis ma route, faisant à la muraille un signe affectueux.
« Dors bien, je ne te réveillerai pas. Le temps viendra où ils t’abattrons ou te couvriront de leur publicité cupide, mais en attendant, tu es là, tu es encore calme et belle, et je t’aime. »
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Hermann Hesse / Le loup des steppes (extrait)