« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Cerises d'amour aux robes pareilles

 

 

A la vaillante citoyenne Louise, l’ambu­lan­cière de la rue Fon­taine-au-Roi, le diman­che 28 mai 1871.

 

 

 

Quand nous en serons au temps des ceri­ses,

Et gai ros­si­gnol et merle moqueur

          ­Se­ront tous en fête.

Les bel­les auront la folie en tête

Et les amou­reux du soleil au cœur.

Quand nous en serons au temps des ceri­ses,

Sif­flera bien mieux le merle moqueur

 

Mais il est bien court le temps des ceri­ses,

Où l’on s’en va deux cueillir en rêvant

          ­Des pen­dants d’oreille,

Ceri­ses d’amour aux robes pareilles

Tom­bant sous la feuille en gout­tes de sang.

Mais il est bien court le temps des ceri­ses,

Pen­dants de corail qu’on cueille en rêvant.

 

Quand vous en serez au temps des ceri­ses,

Si vous avez peur des cha­grins d’amour

          E­vi­tez les bel­les.

Moi qui ne craint pas les pei­nes cruel­les,

Je ne vivrai pas sans souf­frir un jour.

Quand vous en serez au temps des ceri­ses,

Vous aurez aussi des cha­grins d’amour.

 

J’aime­rai tou­jours le temps des ceri­ses :

C’est de ce temps-là que je garde au cœur

          Une plaie ouverte.

Et dame For­tune, en m’étant offerte,

Ne sau­rai jamais cal­mer ma dou­leur.

J’aime­rai tou­jours le temps des ceri­ses

Et le sou­ve­nir que je garde au cœur.

 

 

Jean-Bap­tiste Clé­ment (1839-1903). La chan­son "Le Temps des Ceri­ses", fut com­po­sée en 1866 et édi­tée à Bruxel­les, en 1867, avec la musi­que de Renard.