« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

DE TRÈS LOIN DU SOLEIL


 

 

 

 

        Il y a une cave dans la partie du ciel et les chiens taisent

le nom de cette lune-là…

        La mer, penchée dedans, est un gage de larme.

        Il y a aussi la maison du ciel, toute blessée d’une fenêtre

inquiète, ouverte sur une rue

        Où donnent

        De grands anneaux mouvants, de grands ciseaux

d’ailes, utiles comme des dents.

 

        Qui, sans ces oiseaux, s’occuperait de noircir l’aurore ?

 

        J’ai recopié ce monde en tant d’exemplaires que ses

racines me changent les mains. Et mon corps s’y déplace et

le reste avec, avec ma bouche mordue à la suite des pierres.

        Avec moi le crève-chêne

        Et l’attrape-tête,

        Le crue-temps

        Et l’oiseau sec de ciel, les animaux sans terre et des

mains creuses de vent.

 

        Maintenant, quelquefois, dans le miroir désespérément

ouvert, je me vois cuire un cœur soulevé d’un horrible 

battement jeté de très loin du soleil.

Jean-Pierre Duprey / Derrière son double - Œuvres complètes