La Tempête
Par domcorrieras, le dimanche 17 décembre 2017 - Poèmes & chansons - lien permanent
Prospero. Elfes des bois, des lacs, des ruisseaux, des collines,
Et vous qui, sur le sable, en danse imperceptible,
Poursuivez Neptune en reflux, et qui fuyez
Quand il va remonter, et vous, marionnettes
Dansant au clair de lune et traçant ces ronds verts
Où la brebis ne veut brouter une herbe amère,
Vous qui vous amusez à faire vers minuit
Pousser les champignons, et qui prenez plaisir
En écoutant le son des graves couvrefeux,
Vous qui m’avez aidé, de vos forces débiles,
A voiler le soleil de midi, à drosser
Les vents en révolte, à faire hurler la guerre
Entre la verte mer et la voûte d’azur —
J’armais de tous ses feux le tonnerre effrayant
Et j’ai parfois fendu les chênes de Jupin
Avec sa propre foudre et sur leur forte base
J’ai fait trembler les promontoires, retourné
Cèdres et pins par les racines. des tombeaux
Ont, sur mon ordre ouverts, fait s’éveiller leurs morts ;
On les a vus sortir par ma haute magie.
Mais je veux abjurer ces rudes sortilèges
Quand j’aurai demandé (ce que je fais ici)
Quelques accents encor de céleste musique
Pour remplir mes desseins sur leur âme, et cela,
C’était ce que voulait ce charme aérien,
Alors je veux briser ma baguette magique
Et l’enterrer, à bien des toises sous le sol.
Plus profond que jamais ne descendit la sonde.
Je veux noyer mon livre.
…/…
William Shakespeare / La Tempête / Prospero Acte V. Sc. i (extrait)
traduit de l'anglais par Joseph Aynard.