« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

AU ROUGE D’UNE BLESSURE


 

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Vois mer désempennée

Ma chair est découverte

Ouverte à la débauche du sang noir

 

Je vais vomir mes ultimes éclats de poète

sur cette feuille sensible à mon calvaire

Écrire en bleu les négligences de l’amer

 

Amants depuis longtemps

Ensemble nous irons fourbir nos péchés

contre les épées de l’enfer

Sachant pourtant que point n’en vaut la peine.

 

Mes mots sont saouls de la vinasse humaine

Comme nul ne fut jamais.

Il me vient tant envie de le hurler

Qu’aubaines et tourments se signent des deux mains

Que des chaires s’enflamment dans maintes

cathédrales

Tant il fait mal au rire de mes années.

 

Dieu si vous êtes vraiment ce que l’on dit de vous

Ne laissez pas aller à la débâcle un môle

encore debout

Il est l’écervelé du tout dernier radeau

Le miracle dodu

L’espéré de toutes nos repentances.

 

Vois mer désempennée

L’outrageante lumière sur mes ruines

Mes barbelés

L’obsédante figure teintée du gris sauvage

que l’on ne défait plus

Ce visage fou qui te regarde

Regarde

Il a mille ans de déchirures

Et c’est le mien…

 

Vois mer désempennée

Je vais de sillages flous en claques de rebelles

Je vois des villages-clous plantés à même le rêve

Des maux déambuler vers la bêtise

Même la mort n’a plus de prise

Et la robe de sa belle part seule dans mes

canaux à la dérive.

 

Oh vous qui connaissez mon nom

Ne laissez pas teinter de rouge les murs

de ma raison

Elle vaut encore une blessure.

Alphonse Pensa / les cathédrales en flammes