« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Ode à la miche de pain


 

 

 

 

Couvre de chiffons le four chauffé

Pour que son souffle garde jusqu’au

Matin le jeu de sa création.

 

La pâte lève ! Jusqu’à

L’aube dans cette glu que

Se multiplient les bulles

De la fermentation.

 

Que dans l’étroit cuveau,

Ivre de touffeur,

Elle cherche l’issue

Plus loin en hauteur.

 

Qu’elle aspire, vivante,

Ce ne lui est pas trop,

À sa métamorphose

En miche de froment.

 

Et pour la joie du ciel

Et celle de la terre,

Voici le pain couché

Sur la table lavée.

 

Et salée et sévère,

Brûlante miche d’or

Toute pareille à l’aube.

Varlam Chalamov / Cahiers de la Kolyma