SECONDE NATURE
Par domcorrieras, le vendredi 18 novembre 2016 - Poèmes & chansons - lien permanent
En l’honneur des muets des aveugles des sourds
À la grande pierre noire sur les épaules
Les disparitions du monde sans mystère.
Mais aussi pour les autres à l’appel des choses par leur nom
La brûlure de toutes les métamorphoses
La chaîne entière des aurores dans la tête
Tous les cris qui s’acharnent à briser les mots
Et qui creusent la bouche et qui creusent les yeux
Où les couleurs furieuses défont les brumes de l’attente
Dressent l’amour contre la vie les morts en rêvent
Les bas-vivants partagent les autres sont esclaves
De l’amour comme un peu l’être de la liberté.
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Aux grandes inondations de soleil
Qui décolorent les parfums
Aux confins des saisons magiques
Aux soleils renversés
Beaux comme des gouttes d’eau
Les désirs se dédoublent
Voici qu’ils ont choisi
Les tortures les plus contraires
Visage admirable tout nu
Ridicule refusé comme rebelle
Dépaysé
Tournure secrète
Chemins de chair et ciel de tête
Et toi complice misérable
Avec des larmes entre les feuilles
Et ce grand mur que tu défends
Pour rien
Parce que tu croiras toujours
Avoir fait mal par amour
Ce grand mur que tu défends
Inutilement.
Sous les paupières dans les chevelures
Je berce celles qui pensent à moi
Elles ont changé d’attitude
Depuis les temps vulgaires
Elles ont leur part de refus sur les bras
Les caresses n’ont pas délivré leur poitrine
Leurs gestes je les règle en leur disant adieu
Le souvenir de mes paroles exige le silence
Comme l’audace engage toute la dignité.
Entendez-moi
Je parle pour les quelques hommes qui se taisent
Les meilleurs.
Paul Éluard / L’AMOUR LA POÉSIE (1929)