« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

ODES EN SON HONNEUR - X


 

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Et maintenant, aux Fesses!

Je veux que tu confesses,

Muse, ces miens trésors

Pour quels — et t’y fies —

Je donnerais cent vies

Et, riche, tous mes ors

Avec un tas d’encors.

 

Mais avant la cantate

Que mes âmes et prostate

Et mon sang en arrpet

Veut dire à la louange

De son cher Cul que l’ange…

O déchu! saluerait,

Puis il l’adorerait,

 

Posons de lentes lèvres

Sur les délices mièvres

Du dessous des genoux,

Souple papier de Chine,

Fins tendons, ligne fine

Des veines sans nul pouls

Sensible, il est si doux!

 

Et maintenant, aux Fesses!

Déesses de déesses,

Chair de chair, beau de beau,

Seul beau qui nous pénètre

Avec les seins, peut-être,

D’émoi toujours nouveau,

Pulpe dive, alme peau!

 

Elles sont presque ovales,

Presque rondes. Opales,

Ambres, roses (très peu)

S’y fondent, s’y confondent

En blanc mat que répondent

Les noirs, roses par jeu,

De la raie au milieu.

 

Déesses de déesses!

Du repos en liesses.

De la calme gaîté,

De malines fossettes

Ainsi que des risettes.

Quelque perversité

Dans que de majesté…!

 

Et quand l’heure est sonnée

D’unir ma destinée

A Son Destin fêté,

Je puis aller sans crainte

Et bien tenter l’étreinte

Devers l’autre côté :

Leur concours m’est prêté.

 

Je me dresse et je presse

Et l’une et l’autre fesse

Dans mes heureuses mains.

Toute leur ardeur donne,

Leur vigueur est la bonne

Pour aider aux hymens

Des soirs aux lendemains…

 

Ce sont les reins ensuite,

Amples, nerveux qu’invite

L’amour aux seuls élans

Qu’il afille dans ce monde,

C’st le dos gras et monde,

Satin tiède, éclairs blancs,

Ondulements troublants.

 

Et c’est enfin la nuque

Qu’il faudrait être eunuque

Pour n’avoir de frissons,

La nuque damnatrice,

Folle dominatrice

Aux frissons polissons

Que nous reconnaissons.

 

O nuque proxénète,

Vaguement déshonnête

Et chaste vaguement,

Frisons, joli symbole

Des voiles de l’Idole

De ce temple charmant,

Frisons chers doublement!

Paul Verlaine / Poèmes érotiques / Odes en son honneur