« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

CCXII


 

 

 

 

Beato in sogno e di languir contento,

D’abbraciar l’ombre e seguir l’aura estiva,

Nuo per mar che non ha fondo o riva,

Solco onde, e ’n rena fondo e scrivo in vento.

 

E ‘l sol vagheggio si ch’elli ha già spento

Co’l suo splendor la mia vertù visiva ;

E una cerva errante e fugitiva

Cacio con un bue zoppo e ‘nfermo e lento.

 

Cieco e stanco ad ogni altro ch’al mio danno

Il qual dì e notte palpitando cerco,

Sol Amor e Madonna e Morte chiamo.

 

Cosi venti anni (grave e lungo affanno !)

Pur lagrime e sospiri e dolor merco :

In tale stella presi l’esca e l’amo !

 

 

………………………….

 

 

Satisfait d’illusion et content de languir,

D’enlacer un fantôme et de suivre un zéphir,

Je vogue sur des eaux sans fond et sans rivage,

Labourant onde et sable, et j’écris sur du vent ;

 

Je courtise un soleil, et déjà diminue,

Soutenant son éclat, la portée de ma vue ;

Je pourchasse une biche errante et fugitive

Monté sur un bœuf lent, claudiquant et infirme.

 

Aveugle et las pour tout — sauf pour ma perdition

Que de nuit et de jour pantelant je recherche —

J’en appelle à l’Amour, à ma Dame, à la Mort.

 

Ainsi depuis vingt ans (le cœur à bout de souffle !)

Je n’ai gagné que pleurs et regrets et tourments :

Sous tel astre j’ai appris avec l’appât le fer.

François Pétrarque / La vertu et la grâce