« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

D’Amour, de vin et de mots (morceaux choisis)


 

 

 

 

48

 

Même mauvais, donne-le moi, ce tonneau

Que je puisse noyer les nouvelles du mal-dire

Les voilà ceux qui, hier, me rendaient la rime

Les voilà prosternés devant les dictées du vizir

Awid ma chérie, et laisse-moi à mon délire

J’étanche ma soif loin de leurs abimes

Et sur leur passage j’urinerai avec plaisir  !

 

 

60

 

Je sais, Jean, mon ami, mon taulier préférée

Que ton comptoir est beau, ton béret magnifique

Je sais fiable ta compagnie, généreuse ta table et dévouée

Rien en toi ne sonne douteux ni maléfique

Mais entre nous, ce qu’on t’a dit je te le redis

Depuis que la belle Janine s’est barrée

Banale est ton ambiance  ; mauvais ton vin est devenu 

 

 

 

67

 

 

Oui, ma vilaine, je ne dirai pas non

Pour celui-ci et pour bien d’autres canons

Celui que tu tiens et ceux que ton corps met devant

Je boirai des deux en même temps

Car je ne sais si au paradis des dieux il existe

Des salopes comme toi parmi les promises odalisques

Et des verres à pieds qui attendent mes doigts salutaires

 

 

 

 

70

 

 

Elles ne courent plus les rues

Les femmes des plaisirs authentiques

Elles n’ont pas d’heures pas de parfums

Elles ont tourné le dos aux cités mirifiques

Je les trouve dans les jardins oubliés

Et au fond des cafés, solitaires et mélancoliques

Usant de breuvages similaires à leurs traits nostalgiques

 

 

 72

 

 

Vrai, comme tu le dis si bien, Maître

Que la taverne nous fait rattraper

Le temps perdu dans les mosquées

La rue nous rend l’art et la poésie 

Que menacent leur morale et leurs inepties

Quant au bordel, il nous restitue les secrets des femmes

Que les muftis veulent nous confisquer

Kader Rabia / D’Amour, de vin et de mots - Livre deuxième