« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

MUÍPITI


 

 

 

avec l’île pour toi

 

 

Là où reposent toutes les armes. Un palmier

harmonise notre rêve. L’ombre.

Où je suis moi-même. Lent et nu. Sur

les eaux éternelles. Où je ne suis jamais allé et où les anges

jouent aux bateaux avec des livres comme des mains.

Où nous mangeons le dernier quartier acidulé

des réthoriques inutiles. Là où nous sommes inutiles.

De purs objets naturels. Un palmier

en verroterie sous le soleil. Qui chante.

Là où dans la nuit l’île abrite tous les isthmes

et les voix s’agitent. la statuaire inguinale

maconde* jaillit. Non pétrifiée.

C’est où je suis dans ce poème sans jamais y être allé.

Ton nom que je crie en me moquant du nom.

De mon nom annulé. Les coraux t’annoncent.

Et je me perds. Et je suis nu. Lent. À l’intérieur du corps.

Un palmier s’ouvre au silence.

Là où je connais la mâchoire qui saigne. Où les léopards

font naufrage. Le temps. La cigarette qui tire

dans les poumons. La terre gorgée. Qui jaillit. Rouge.

Là où je me confonds avec toi. Enfant pliant

sous le poids d’être un homme. Un palmier bleu

au front humide. la mémoire de l’infini.

Le repos s’interroge lui-même. Ecoute.

La ronde mais aucun avion n’est parti. là où noius sommes.

Où les oiseaux sont des oiseaux et où tu dors.

Et je flotte sur des sanglots de syllabes. Où

je fuis ce poème. Un palmier de feu.

Dans l’île. Incendie notre nom.

 

 

……………………………………….

*Maconde : peuple du nord du Mozambique

Luís Carlos Patraquim/18 + 1 poètes contemporains de langue portugaise
traductions d’Isabel Meyrelles, Annick Moreau & Michel Riaudel