JE NE CONNAIS PAS CET INCONNU
Par domcorrieras, le mardi 26 avril 2016 - Poèmes & chansons - lien permanent
Je ne connais pas cet inconnu
ni ses bonnes actions…
J’ai croisé un enterrement et j’ai marché
derrière le cercueil,
comme les autres, dodelinant de la tête
en signe de respect.
Je n’avais pas de raison de demander :
Qui est cet inconnu ?
Où a-t-il vécu, de quoi est-il mort ?
(Les causes des décès
sont multiples dont celle de la douleur de vivre.)
Je me suis demandé : Nous voit-il ? Voit-il plutôt
un néant et regrette-t-il l’épilogue ? Je savais
qu’il ne soulèverait pas le couvercle du cercueil
recouvert de lilas
pour faire ses adieux, nous remercier
et nous souffler la vérité.
(Qu’est la vérité ?) Peut-être replie-t-il son ombre,
comme nous en ce moment. Mais il est le seul
à ne pas avoir pleuré ce matin,
ni vu la mort tournoyant au-dessus de nous
tel le faucon…
(Les vivants sont cousins germains de la mort
et les morts,
dormants paisibles et paisibles et paisibles.)
Je n’avais pas
de raison de demander : Qui est l’inconnu ?
Quel est son nom ?
(Pas d’éclair luisant dans son nom.)
Vingt personnes marchent derrière lui,
sans compter moi (moi et mon autre).
A la porte de l’église, je me suis égaré
dans mon cœur :
C’était peut-être un écrivain, un ouvrier,
un réfugié,
un voleur, un assassin… Quelle différence ?
Les morts sont égaux devant la mort… Muets
et peut-être ne rêvent-ils pas…
Et ces funérailles de l’inconnu pourraient être
les miennes,
mais un quelconque décret divin les remet
à plus tard
pour de multiples raisons
dont : un grave défaut dans le poème !
Mahmoud Darwich / Comme des fleurs d’amandier ou plus loin - III. MOI