Chanson du siège de La Rochelle
Par domcorrieras, le lundi 25 avril 2016 - Poèmes & chansons - lien permanent
Nos soldats à La Rochelle
N’ont ni vestes ni souliers
Que vouliez-vous donc la belle
Qu’est-ce donc que vous vouliez
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Dites-moi comment s’appelle
Ce jeu-là que vous jouiez
On dirait une marelle
Quel jeu quel jeu singulier
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
La guerre Mademoiselle
Est le jeu que vous disiez
Il se joue avec des ailes
Il se joue à cloche-pied
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Pour pousser la pierre au ciel
Il faut tenir le dernier
La guerre est un jeu cruel
Il s’agit de la gagner
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Les uns la font en dentelles
D’autres comme vous voyez
Quand la cause est immortelle
Faut-il que vous le soyez
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Les uns sont dans leurs tourelles
Sur leurs chars blindés d’acier
D’autres trouvent naturel
Le simple abri des osiers
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Si j’ai foi dans ma querelle
Je ne crains pas les Dorniers
Nous avons des pare-grêle
Et des képis de douaniers
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Mes pauvres enfants dit-elle
Mes beaux mes beaux canonniers
Elle en perd sa ritournelle
Si triste qu’elle s’assied
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Mon cœur mon cœur en chancelle
Je n’ai rien dans mon panier
Je n’ai rien dans ma nacelle
Je vais voir dans mon grenier
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Elle y trouve une crécelle
Un diplôme de pompier
Un sifflet de la ficelle
Et des roses en papier
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Des paroles éternelles
Un loto des coquetiers
Un vieux sachet de cannelle
Un carton des Trois-Quartiers
Des canons
Par centaines
Et des fusils par milliers
Que vouliez-vous donc la belle
Qu’est-ce donc que vous vouliez
Nos soldats à La Rochelle
N’ont ni vestes ni souliers
DES CANONS
PAR CENTAINES
ET DES FUSILS PAR MILLIERS
Louis Aragon / Quelques poèmes inédits