« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

ALLÔ

 

 





Mon avion en flammes mon château inondé de vin du Rhin

mon ghetto d’iris noir mon oreille de cristal

mon rocher dévalant la falaise pour écraser le garde champêtre

mon escargot d’opale mon moustique d’air

mon édredon de paradisiers ma chevelure d’écume noire

mon tombeau éclaté ma pluie de sauterelles rouges

mon île volante mon raisin de turquoise

ma collision d’autos folles et prudentes ma plate-bande sauvage

mon pistil de pissenlit projeté dans mon œil

mon oignon de tulipe dans le cerveau

ma gazelle égarée dans un cinéma des boulevards

ma cassette de soleil mon fruit de volcan

mon rire d’étang caché où vont se noyer les prophètes distraits

mon inondation de cassis mon papillon de morille

ma cascade bleue comme une lame de fond qui fait le printemps

mon revolver de corail dont la bouche m’attire comme l’œil d’un puits

scintillant

glacé comme le miroir où tu contemples la fuite des oiseaux-mouches
                                                                                          de ton regard

perdu dans une exposition de blanc encadrée de momies

je t’aime

Benjamin Péret