« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Donne-leur

 

 

 

 

 

 

A Pablo Armando Fernandez

 

 

Donne-leur

tes ballons colorés,

tes plus belles toupies

et un terrain d’insouciance que jamais

le corbeau ne survolera.

Donne-leur des raisons,

des mains qui soutiennent leur espoir.

Donne-leur des verres

grossissants qui multiplient

une et mille fois

la joie.

 

En Occident

on a fermé les parcs

des enfants.

Les rondes ont fini

de tourner ; dans le soir violet

regarde comme sautille

la pie des anciens mythes !

 

Achète-leur du pain,

achète-leur un fusil plus dur

que la lutte des classes ;

je ferai le coup de feu avec eux

— enfants occidentaux —

dans les envols et les cris

de tristes oiseaux.

 

Ah, rondes sauvages !

Ah, solides battants

que sape

une mer hostile !

La vieille nuit d’Occident

arrive pour expliquer

de tous ses mégaphones

q’il est encore des raisons

à sa folie.

Heberto Padilla, poète cubain (20 janvier 1932 – 25 septembre 2000)