« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Eurydice à Prague II

 

 






Écartant sa fourrure vaste elle montrait

ses seins ronds d’où coulait à la lune un lait d’ombre

et j’aspirais le souvenir entre ces seins

mourant j’y saluais ma religion noire

 

C’était sur une place immense au loin bordée

de piques, de palais où bombait aux façades

l’ennui démesuré des nus. Un tel désert

entre les murs, que la courbure de la terre

 

Incurvait ce lieu vide à la Mort. Adossée

au grand ciel ruiné qui tremblait sur sa base

elle riait, la peau plus blanche que les dents

tremblante aussi d’ardeur funeste et de colère

 

Haineux, de haut en bas par sa main lézardé

je fus nus sur un fond fuyard de vent lunaire,

et mon ombre qui la couvrait cheval ailé

de l’aile et du sabot faisait crouler les pierres.

Pierre Emmanuel / Tristesse ô ma patrie