« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

Alcool

 

 

 

 

 

 

Qui a écrit : « Comme le bouquet final d'un feu d'artifice qui recouvre la mer où je suis englouti » ?

 

     — Franchement, je ne sais pas, mais c'est beau.

 

     — Je dirais Apollinaire. C'est tout à fait son style.

 

     — Moi je parie sur Mallarmé ou Eluard. C'est un peu surréaliste, mais j'adore.

 

     — Pour moi, c'est Aragon. Une plume en or qui t'endort de vers qui n'ont ni queue ni tête.

 

     — Je vote Eluard. « La terre est bleue comme une orange ». Sauf qu'ici, l'auteur ne précise pas que la mer est orange. Mais je risque.

 

     — Verlaine, sans aucun doute. La musicalité est incomparable.

 

     — Rimbaud ? Peut-être. Dans le genre Bateau Ivre. Mais en plus… sobre.

 

Jusque-là, Nadine s'était tue. En bon prof de français, elle préparait sa réponse.

 

     — Blondin ! Un Singe en hiver ! C'est une parole d'alcolo, et Blondin l'était. Et le film, avec Gabin et Belmondo, se termine par un mémorable feu d'artifice, sur la mer de surcroît.

 

     Nadine avait raté la cible, mais de fort peu.

 

     Je n'avais jamais songé à Blondin.

 

     Et pourtant, Un Singe en hiver, je l'ai vu plusieurs fois.

 

     L'inconscient m'a joué un bon tour qui me vaut de côtoyer, l'espace d'un instant, les étoiles scintillant au firmament de la Poésie.

Jean-François Payfa / Bianconero -Textes courts en noir et blanc.