« Il n'y a pas de plus grand poète.
Il y a la poésie. »

Paul Fort (Canzone du vrai de vrai / Portraits sur le sable)

ÉLÉ­GIE PAS­TO­RALE

 

 





Le beau ber­ger n’est plus, la belle l’a tué.

La fille a immolé qui avait désir d’elle.

En échange d’amour, la mort elle a donné,

Elle a teint son épée dans le sang du ber­ger,

Et éteint le flam­beau des amours immor­tel­les.

Le beau ber­ger n’est plus, la belle l’a tué.

Elle n’a écouté ni les rocs des mon­ta­gnes,

Les nym­phes, le tilleul, le pin qui l’implo­raient.

« Ah! ne le frappe pas, ne tue pas le ber­ger. »

Le loup l’avait pleuré, et les ours sans pitié,

Le lion l’a pleuré de ses yeux redou­ta­bles.

 

Le beau ber­ger n’est plus, la belle l’a tué.

Cher­chez une autre roche, ô pais­san­tes génis­ses.

Vous, tau­reaux, allez paî­tre en des lieux étran­gers.

Mon doux ber­ger est mort de son ardent délice.

De sa main, dans ses monts, la fille l’a frappé.

Pâtu­ra­ges, adieu! et vous, adieu, ô prés!

 

Le beau ber­ger n’est plus, la belle l’a tué.

Adieu, fon­tai­nes, et vous, adieu, abris rocheux!

Adieu, Nym­phes des eaux et des lieux boca­gers!

 

Le dieu des chants répond à Pan, rus­ti­que dieu :

« Que périsse la flûte, et où est la Ven­geance?

Où donc est la beauté? Laisse, Amour, ton car­quois :

Que la flûte à jamais reste dans le silence :

Car le ber­ger n’est plus, dont claire était la voix. »

 


 

Non­nos de Pano­po­lis (poète gréco-égyp­tien du début du Ve siè­cle de l’ère chré­tienne) / Dio­ny­sia­ques / Chant XV